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DE L’INVESTISSEMENT DURABLE EN EPARGNE D’ENTREPRISE 

 

 

  ISR, ESG, Investissement Durable ? Quelles différences ?

  • Il convient de bien comprendre ce qui se cache derrière tous les acronymes utilisés autour de la Finance Durable, cette multitude de termes illustrant l’hétérogénéité des approches. Dans le monde anglo-saxon, on retrouve d’ailleurs bien les mêmes notions d’ESG et d’ISR (traduit par SRI).

    • Les critères ESG ou extra- financiers constituent un outil d’analyse pour prendre en compte ces enjeux et peuvent se comparer aux données comptables nécessaires pour réaliser des analyses financières. L’analyse de ces critères permet de mettre en place différentes stratégies de fonds

    • L’ISR ou SRI est la première étape de la déclinaison à la finance des principes de Développement Durable. Cette étape a vu le jour dans les années 2000 et correspond à la sélection des meilleurs élèves (best in class ou best in universe) en matière de critères extra-financiers. Depuis le marché a évolué très vite, en introduisant d’autres approches ISR : fonds d’intégration de critères ESG, fonds d’impacts, fonds thématiques…

 

Tout ce vocabulaire se rassemble sous le mot de Finance Durable dont l’objectif est de ramener des approches de moyen- long terme dans les décisions d’investissement. L’ISR renvoie à une approche spécifique, souvent assimilée à des contraintes d’investissement alors que parler de Finance Durable permet de considérer qu’il subsiste de multiples approches.

La difficulté actuelle demeure la multiplicité des approches : chaque société de gestion a sa propre approche en fonction de ses différents prismes, il n’y a pas d’approche meilleure que l’autre à partir du moment où il y a transparence et lisibilité dans ce que la société de gestion fait dans la gestion de ses fonds.

 

Pour sortir de la jungle des acronymes, deux points essentiels doivent être retenus :

  • Comprendre comment chaque société de gestion fait de la Finance Durable en termes de méthodologie et de décision d’Investissement. Concernant Groupama AM, l’approche d’intégration ESG s’est mise en place progressivement et peut se résumer ainsi :

    • La méthodologie d’analyse s’appuie sur l’équipe de Recherche qui a une double spécificité : 

      • L’analyste couvre l’analyse financière crédit & actions 

      • Il intègre dans chacune de ses études les enjeux extra-financiers

    • Les gérants reçoivent une information intégrée qui leur permet de connaître :

      • Les principaux enjeux ESG pour chaque secteur et chaque valeur suivie

      • Leurs impacts sur les critères financiers.  

      • Les notations Vigéo (E&S) ou MSCI (G), pour couvrir un univers très large, permettant aux gérants de déceler l’information ESG pertinente en fonction des valeurs. Il ne s’agit pas d’avoir une approche multi critères mais de sélectionner les critères pertinents

    • Les gérants et analystes rencontrent de nombreuses entreprises et depuis la création de l’analyse ESG au sein de Groupama AM (2004), il est obligatoire que des questions ESG fassent partie des questions posées au top management

  • Favoriser le développement des labels pour que la clientèle puisse avoir une « garantie » : le label permet aux épargnants de s’assurer que le gestionnaire de fonds respecte un cahier des charges défini (label ISR ou Greenfi) et contrôlé par un auditeur externe. Parallèlement, il faut également que les reportings des fonds soient clairs et transparents sur la manière dont ils répondent à l’objectif ESG du fonds. Il faut trouver des indicateurs qui parlent, qui montrent l’impact réel, ce qui est encore difficile aujourd’hui car les données sont nombreuses mais non normées.

A titre d’illustration, cette approche des enjeux extra-financiers chez Groupama AM est déclinée en quatre axes selon les objectifs de gestion :

1. L’intégration ESG : prise en compte explicite et systématique des critères ESG dans les décisions d’investissement

2. La gestion ISR : dans laquelle est construit un univers d’investissement défini selon une approche « best in class »

3. La gestion Thématique : investir dans des entreprises développant des produits & services et/ou pratiques répondant à une thématique E(nvironnement) ou S(ocial) ciblée

4. La gestion d’impact : investir dans des entreprises et/ou projets démontrant un impact positif mesurable sur un des piliers de l’ESG

 

Selon les pays, on observe également quelques nuances. Avec l’arrivée des pays anglo-saxons dans le domaine des investissement responsables, on rentre dans une approche plus économique, et pragmatique avec l’idée que l’intégration de données ESG améliore l’analyse fondamentale et devrait à terme permettre de générer des profils de rendement/risque plus attractifs (de même pour que la participation active à la gouvernance – politique de vote et d’engagement). Le concept d’intégration des externalités dans les décisions d’investissement en est un bon exemple. Les acteurs étrangers considèrent parfois que certaines sociétés de gestion françaises qui disposent d’une longue tradition ISR ont encore parfois une perspective liée à des principes qu’on pourrait qualifier d’ISR 1.0 simplement basée sur les filtres négatifs.

  Quelques exemples d’investissements durables…

Sycomore AM s’est fixé pour mission d’« humaniser l’investissement ». L’ambition est de donner du sens aux investissements des épargnants en créant de la valeur durable et partagée. L’objectif est d’investir dans des entreprises qui ne sont pas appréciées à leur juste valeur et présentent donc des perspectives d’amélioration de leur cours de bourse. Pour ce faire, au-delà des états financiers, les analystes-gérants observent l’interaction de ces entreprises avec l’ensemble de leurs parties prenantes pour évaluer la solidité de leur modèle économique et leurs impacts sociaux, sociétaux et environnementaux.

 

Convaincus qu’une entreprise ne peut créer de la valeur sur le long terme que si celle-ci est partagée par l’ensemble de ses parties prenantes, l’approche a été structurée autour d’un modèle d’analyse fondamentale SPICE intégrant cinq parties prenantes :

  • La société civile et les fournisseurs constituent le premier groupe de parties prenantes et forment le S (Society & Suppliers).

  • Les collaborateurs constituent le P (People).

  • Les investisseurs forment le I (Investors) visant l’analyse de la qualité du modèle économique et de la gouvernance.

  • La quatrième partie prenante regroupe les clients et forme le C (Clients).

  • Enfin, la cinquième partie prenante est l’environnement et forme le E (Environment).

 

Chacune de ces 5 parties prenantes fait l’objet d’une analyse indépendante, qui aboutit à l’attribution d’une note (notes S, P, I, C & E) inscrite sur une échelle de 1 à 5. La moyenne pondérée de ces différentes notes, ajustée selon le secteur et les activités de l’entreprise, constitue la note globale SPICE de l’entreprise. Celle-ci intègre au total 80 critères, qualitatifs ou quantitatifs.

Dans les modèles de valorisation d’entreprise, cette note influe sur le calcul du cours cible de l’action de l’entreprise. Elle impacte jusqu’à +/- 40 % le coefficient de risque (β) utilisé dans le calcul du coût moyen pondéré du capital de l’entreprise (WACC) et du taux d’actualisation des flux financiers futurs, impactant ainsi la valorisation financière de l’entreprise.

La note SPICE d’un fonds, résultat de la moyenne pondérée des notes SPICE des entreprises en portefeuille, reflète ainsi sa performance en matière de développement durable.

 

Dans cet esprit, la société a lancé voilà quelques années un fonds dit « Happy at Work ».  Forts de plus de 20 ans d’expérience au contact des entreprises, le constat suivant a été fait : les entreprises qui se démarquent dans la durée et qui présentent des parcours boursiers remarquables ont un point commun, elles se distinguent par de fortes cultures d’entreprises et par l’engagement de leurs collaborateurs au service du succès collectif de leur société. Ce constat est documenté par de nombreux travaux de recherche qui illustrent que d’une part, le mal-être au travail a un coût pour l’entreprise, et d’autre part, des collaborateurs épanouis sont plus engagés et performants dans la durée.

L’une des plus récentes études publiées par Glassdoor en 2015 indique par exemple que 1 000 $ investis en 2009 dans un portefeuille de 50 entreprises américaines classées « best places to work » auraient rapporté 3 470 $ à fin septembre 2014 contre seulement 2 210 $ pour un investissement du même montant dans le S&P 500. Les 30 « worst places to work » auraient quant à elles sous-performé de près de 30% cet indice sur la même période. En 2015, la méta-étude dirigée par Harvard Law School dans le cadre de son programme Pensions and Capital Stewardship a également démontré que la majorité des 92 études analysées établissaient un lien entre la bonne gestion du capital humain et la performance financière et boursière des entreprise.

En bref, des collaborateurs épanouis sont plus créatifs, plus impliqués et plus performants dans la durée. Les entreprises sont plus productives et peuvent générer une croissance pérenne en minimisant leurs risques, avec un turnover et un taux d’absentéisme plus faibles ou encore avec une diminution de la fréquence et de la gravité des accidents du travail.

 

Concrètement, en 2015, Sycomore AM a décliné ces enseignements de deux manières :

  • D’une part, en faisant évoluer le cadre d’analyse des pratiques liées au capital humain des entreprises en renforçant et structurant la lettre P(eople) de notre modèle SPICE avec 50% de son poids reposant sur ce qui est appelé l’environnement « Happy@Work ». 

  • D’autre part, le fonds Sycomore Happy@Work a été lancé. Il investit uniquement dans les entreprises accordant une importance particulière à la valorisation du capital humain. Labellisé ISR, le fonds est basé sur une analyse de développement durable avec une dimension sociale prépondérante.

 

La manne d’informations recueillies est structurée autour de cinq piliers, allant de critères fondamentaux jusqu’à la prise en compte de l’épanouissement professionnel des collaborateurs : le Sens, l’Autonomie, les Compétences, les Relations et l’Equité. Par équité, il faut comprendre l’application pragmatique à l’échelle de l’entreprise du droit humain fondamental à l’égalité des chances et de traitement. Le champ de l’équité est d’autant plus vaste que les individus sont différents et se perçoivent comme tels. Il est lié à la diversité qui constitue elle-même une dimension de la richesse du capital humain et une source de résilience d’une organisation. Sont analysés ainsi aussi bien l’ouverture à la diversité que les mécanismes de partage des fruits de l’entreprise, avec une attention particulière portée à l’intéressement aux résultats et aux écarts salariaux entre les collaborateurs et la direction générale. A ce titre, il a été instauré en 2017 un critère de modération parmi les critères qui permettent notamment de se prononcer sur la rémunération des dirigeants dans le cadre des Assemblées Générales. Ces principes sont plus précisément décrits dans la Politique de vote de la société de gestion.

Comment sensibiliser les salariés à l’ISR ?

Le terme est peu connu du grand public et il y a un nombre extrêmement important de types d’approche « ISR » : best in class, exclusions, positif screen, thématique, engagement, impact. 

Communiquer sur une gamme ISR peut parler à des partenaires avertis (Conseils de Surveillance, Directions Financières, partenaires sociaux… ) mais rarement à l’épargnant final.

Si l’on souhaite un développement de l’esprit ISR auprès des investisseurs finaux, il faut plutôt tabler sur des fonds thématiques, qui parlent, comme « l’impact investing » par exemple.

Chez Pictet AM l’approche se veut également simple. Le groupe a lancé en janvier 2000 l’un des premiers fonds thématiques sur l’environnement : PICTET Water. L’idée étant que les entreprises apportant des solutions liées à la problématique de l’eau vont observer de taux de croissance supérieurs a ceux de l’économie mondiale. Investir dans ce type d’entreprise a un effet « gagnant-gagnant » puisque l’investisseur bénéficie de rendements supérieurs tout en apportant du capital à des entreprises développant des solutions écologiques et durables. Si de plus, on s’assure que certaines activités controversées soient exclues d’office, que les dimensions ESG soient prises en compte et que l’on soit actif quant à la détention de ces titres (politique de vote et d’engagement) on dispose alors de tous les ingrédients pour en faire des stratégies d’investissement hautement durables.

Quelques limites à garder à l’esprit

  • Attention à ne pas être contreproductif.

Le fait d’investir, par exemple, dans un fonds « low carbon » en excluant les plus grosses sociétés émettrices de CO2 sera intellectuellement satisfaisant et l’épargnant pourra se gratifier d’être investi dans des « valeurs vertueuses ». Cela fera-t-il avancer pour autant la transition énergétique ? Ne faudrait-il pas aider au contraire celles qui sont en retard ?  Les gérants de place ne tiennent-ils pas déjà compte des externalités issues du processus de production des entreprises qu’ils détiennent en portefeuille ? Une gestion conventionnelle peut-elle ignorer la dimension ESG ? Est-il nécessaire d’imposer des critères ISR pour cela ? 

  • Les gestions ISR doivent elles aussi être évaluées en termes de performance.

Quels indices faut-il utiliser ? Il faut s’assurer que la méthodologie ISR utilisée dans la construction de l’indice soit similaire à celle utilisée par la stratégie que l’on veut comparer. L’indice DJSI est par exemple un indice « Best In Class » et n’est par exemple pas approprié pour mesurer la performance d’un fonds thématique. Certaines sociétés de gestion considèrent que les efforts devraient surtout porter sur la définition d’indices standards qui excluraient certaines activités/valeurs - comme les constructeurs d’armes controversée notamment - plutôt que de construire des indices ISR ad-hoc trop spécifiques et donc peu significatifs.

 

  • Enfin, s’il y avait un axe d’amélioration à travailler en priorité, ce serait celui de l’homogénéisation des données extra-financières. Il est important que investisseurs et émetteurs parlent le même langage et qu’ils partagent les mêmes indicateurs et les mêmes mesures.

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